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Autosuffisance en tissus humains: Héma-Québec veut bonifier l'identification

durée 10h00
24 décembre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

5 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Pour assurer la sécurité des patients qui reçoivent une greffe de tissus humains, mais aussi pour avoir une traçabilité des tissus, Héma-Québec a été nommé l'unique maître d'œuvre de ce processus complexe par le ministère de la Santé. Au cours des prochains mois, l'organisme compte concentrer ses énergies à augmenter l'identification des donneurs potentiels.

On sait déjà que Héma-Québec gère les produits sanguins de la province. Il s'occupait aussi depuis plus de 20 ans des activités de prélèvement et de transformation de tissus. Mais depuis le 2 décembre, l'organisme est devenu le seul responsable de la distribution de tissus humains pour tous les hôpitaux du Québec.

Avant ce mandat, certains centres hospitaliers se chargeaient de trouver des donneurs hors de la province, surtout aux États-Unis, pour s'approvisionner en tissus dont les stocks québécois ne répondent pas à la demande.

Un peu plus de la moitié de tous les tissus utilisés dans les hôpitaux proviennent de donneurs prélevés et préparés par Héma-Québec, le reste étant issu principalement du marché américain. L'organisme a désormais le contrôle complet sur l’approvisionnement pour l’ensemble du réseau hospitalier du Québec.

Le risque de contamination de tissus n'est pas seulement théorique, a fait valoir Dr Marc Germain, vice-président aux affaires médicales et à l’innovation chez Héma-Québec. Il a parlé de cas récents de contamination aux États-Unis.

En 2021, une épidémie de tuberculose a eu lieu aux États-Unis en raison d'un seul donneur décédé. Des produits de greffes osseuses contenant des cellules vivantes ont été distribués dans 37 hôpitaux de 20 États, et 113 receveurs ont reçu une greffe contaminée.

Dr Germain précise que l'exemple de contamination osseuse n'est pas possible au Québec puisque les tissus osseux sont irradiés par des rayons gamma. Mais il y a d'autres types de tissus qui ne sont pas stérilisés de façon complète, comme les valves pulmonaires qui sont trempées dans un liquide antibiotique, mais pas irradiées.

«Le risque zéro, ça n’existe pas parce que ce sont des produits biologiques d’origine humaine et ça comportera toujours un risque. C’est pour cela que la traçabilité est essentielle, souligne Dr Germain. La motivation première de demander à Héma-Québec de prendre charge de la distribution des tissus, c’est pour assurer la qualité et la traçabilité des tissus.»

Processus complexe

Comparativement aux organes qui doivent être prélevés lorsque la circulation est toujours fonctionnelle ou qu'elle vient tout juste de s'arrêter, les tissus humains disposent de beaucoup plus de temps, ce qui permet à Héma-Québec de s'occuper du prélèvement dans ses laboratoires.

Quelques tissus font exception, tels que les valves cardiaques qui doivent être disséquées dans un délai de 24 heures. Même chose pour les cornées qui se conservent seulement 12 jours et qui sont habituellement prélevées directement à l'hôpital, puis amenées à la Banque d'yeux du Québec. À titre de comparaison, les os et les tendons sont conservés jusqu'à cinq ans.

Dans les laboratoires d'Héma-Québec qui sont situés sur le campus de l'Université Laval, à Québec, le personnel est en mesure de recevoir directement les donneurs décédés. C'est là qu'on procède ensuite à la préparation du corps avec un examen minutieux pour valider qu'il n'y a pas de signes d'infections. «Une fois que le corps est prêt, le personnel entre dans le sas. Le personnel sort, se change, se nettoie, se prépare pour entrer dans la salle de prélèvement. Là, ils vont procéder au prélèvement des différents tissus», décrit Dr Germain.

Les tissus sont mis dans des emballages stériles puis placés dans «une salle de quarantaine», en attendant les résultats de tous les tests des maladies transmissibles et les analyses bactériologiques. Une fois que les tissus sont déclarés conformes pour la greffe — ce qui peut prendre plusieurs semaines — ils sont prêts à être transformés et préparés. Ils sont amenés dans une salle blanche dédiée à la transformation de tissus. On les découpe, on les prépare, on les met dans leur emballage final, et ils sont ensuite mis dans «l’aire de produits conformes prêts à être envoyés aux hôpitaux».

Les salles de prélèvements et de préparations ont des systèmes de ventilation spéciaux avec des filtres à haute performance, ce qui donne de l'air plus propre que dans des salles d'opération, soutient Dr Germain. Tout risque de contamination est minimisé.

Bonifier l'identification de donneurs

«Le grand défi des dons de tissus, c’est d’être mis au courant quand il y a un donneur potentiel», affirme Dr Germain. Pour augmenter l’identification, il estime qu'il faut davantage sensibiliser les gens dans le réseau de la santé.

La majorité des Québécois et des familles sont favorables aux dons d’organes et de tissus, indique-t-il. «L’enjeu, c’est quand un décès survient, si on n'est pas notifié, et si on n'a pas l’opportunité d’aller offrir la possibilité de faire le don d’organes ou de tissus, on perd ces opportunités», explique-t-il. Autant que pour le don d'organes, le personnel dans le réseau doit absolument participer, que ce soit dans les hôpitaux ou les médecins qui font des constats de décès à domicile, par exemple.

Des employés d'Héma-Québec sont déjà postés dans des centres hospitaliers où il y a un grand potentiel pour y pratiquer des activités d’identification, de qualification et de prélèvement.

D'autre part, Dr Germain a fait savoir que certains tissus ne sont pas prélevés en ce moment par manque de capacité de les préparer en fonction de certains besoins des médecins. Par exemple, la peau est greffée pour traiter les grands brûlés, mais elle pourrait aussi servir pour une chirurgie de reconstruction du sein des femmes qui ont eu un cancer du sein. «Il y a des produits préparés à partir de peau de donneurs de tissus qui sont beaucoup utilisés et que nous, on n'a pas la capacité de fabriquer. Alors, ce qu’on fait, c’est qu’on s’approvisionne auprès de fournisseurs américains. À long terme, ce qu’on aimerait faire, c’est profiter de nos donneurs pour pouvoir préparer ces tissus au lieu de les acheter sur le marché externe», explique le spécialiste.

Il y a par ailleurs une augmentation depuis quelques années de la demande pour des valves pulmonaires. «On réussit à s’approvisionner pour fournir les besoins, mais il y a une partie de l’approvisionnement qui vient des États-Unis. Ça, on est toujours à la merci parce que s’il y a beaucoup de demandes, à un moment donné, on pourrait se faire dire par les États-Unis: ''désolé, on n'en a plus pour vous''. Donc, on veut augmenter notre autosuffisance pour ces types de tissus, ce qui veut dire aller identifier encore plus de donneurs potentiels.»

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.

Katrine Desautels, La Presse Canadienne

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