Le hurlement du Loup, partie II
Je montrai à mes étudiants une image du monument Hommage à Louis Marcoux que l’on peut voir dans la cour du collège Sacré-Cœur. Louis Marcoux était un ami de Wolfred Nelson. Il a été tué lors de l’élection de 1834. Son assassin, parent du candidat opposé aux Patriotes, fut acquitté par la suite. Le Loup rouge (Wolf Red) en vint à détester profondément le gouvernement.
Je voyais alors mes étudiants s’agiter, en classe, à la suite de mon récit. Ils sentaient qu’une injustice avait été commise.
Le Loup rouge poursuivit sa carrière de médecin et de politicien. En 1837, à la suite du rejet des 92 résolutions des Patriotes qui demandaient à ce que les députés aient le contrôle du gouvernement au lieu d’un gouverneur non élu, il présida l’assemblée des Six-Comtés, malgré l’interdiction gouvernementale de manifester.
Puis, sa tête fut mise à prix et l’armée fut envoyée pour l’arrêter. Le 23 novembre 1837, l’armée de 300 soldats pénétra dans le village de Saint-Denis et s’opposa à 200 résistants dirigés par Nelson. Après une longue lutte acharnée, les Patriotes, mal armés, mal équipés, mais résolus, vainquirent les soldats anglais. Wolfred devint un héros et un chef reconnu.
Il sera tout de même arrêté en décembre et le mouvement patriote de 1837 s’écroula peu de temps après, à Saint-Eustache. Nelson fut exilé et ne revint qu’en 1842. Il a été, par la suite, député de Richelieu en 1844 et 1848, puis maire de Montréal en 1854. Sa mort, en 1863, le ramena à Sorel où il fut enterré.
Mes élèves me regardaient et je sentais que mon récit les avait touchés. Vous savez, Wolfred Nelson est étudié dans tout le Québec. On en parle dans tous les livres d’histoire. Et vous savez quoi ? Il est enterré juste à côté de nous, au cimetière anglican.
Il y repose dans l’anonymat le plus complet. On a restauré sa tombe il y a quelques années, mais rien n’est fait pour signifier aux passants qu’il s’y trouve.
La cloche sonna pour le dîner et les élèves affamés me remercièrent pour ce brin d’histoire avant de courir pour aller se nourrir. Au fond de moi, j’espérais simplement qu’ils n’en retiennent qu’un petit bout. Alors que je rangeais ma classe, je vis, par la fenêtre, un petit groupe de mes étudiants qui traversait le stationnement de l’école pour se diriger sur la rue du Collège. Ils allaient voir Wolfred en sa dernière demeure, attirés par le hurlement du Loup qui refuse de sombrer dans l’oubli.
Et moi, derrière ma fenêtre de classe, ému, je versai une larme de fierté.
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Patrick Péloquin, Société historique Pierre-de-Saurel, www.shps.qc.ca
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