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Canada

Le nombre de sans-abris pourrait diminuer si leur revenu augmentait, dit une experte

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19 février 2024
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Par La Presse Canadienne

Les personnes bénéficiant de programmes gouvernementaux de soutien au revenu se retrouvent de plus en plus souvent dans des tentes ou des campements de sans-abris, ont déclaré des travailleurs communautaires qui ont applaudi le récent appel de la défenseure du logement du Canada à augmenter les salaires minimums et les taux d'aide sociale.

Colin Young vit dans un refuge d'urgence à St. John's, où il reçoit 175 $ par mois grâce au programme de soutien du revenu de Terre-Neuve-et-Labrador, en plus des repas, d'une chambre et d'un toit au-dessus de sa tête. Il est reconnaissant pour tout cela, a-t-il dit dans une récente entrevue : c'est bien mieux que de dormir dans des tentes et dans un stationnement du centre-ville, ce qu'il faisait depuis qu'il a été expulsé de son dernier appartement en 2021.

Toutefois, l'argent n'est pas suffisant pour les choses qui, selon lui, l'aideront à trouver un emploi et à obtenir un logement permanent, a soutenu M. Young.

Avec plus d'argent, «je pourrais avoir des chaussures propres, je pourrais prendre soin de moi, je pourrais sortir et trouver un emploi, avoir l'air productif dans la société», a-t-il affirmé.

«Comment pouvez-vous économiser un dépôt de garantie si vous ne recevez que 87 $ toutes les deux semaines ?», a-t-il ajouté.

La défenseure fédérale du logement, Marie-Josée Houle, surveille les progrès du Canada dans la défense du logement comme droit de la personne, que le gouvernement fédéral a officiellement reconnu en 2019. Mardi, elle a publié un rapport approfondi sur la propagation des campements de personnes en situation d'itinérance à travers le pays, qualifiant la situation de crise nationale de vie ou de mort pour les droits de la personne.

Le rapport formule des dizaines de recommandations, notamment que les provinces augmentent les aides au revenu et le salaire minimum pour refléter le coût de la vie élevé et pour «renforcer les efforts pour prévenir l'itinérance et permettre des transitions réussies vers des solutions de logement adéquates».

Lucas Groltz affirme qu'une augmentation du soutien du revenu ferait une différence tangible pour les personnes vivant dans les campements d'Halifax. Le coordonnateur du programme Navigator Outreach du centre-ville d'Halifax a déclaré que bon nombre de ses clients sont en situation d'itinérance parce qu'ils ne peuvent pas se permettre la hausse de leur loyer, souvent après des rénos-évictions. Même les loyers des pensions, qu'il décrit comme des «motels à cafards», ont doublé ces dernières années, a expliqué M. Groltz.

«Ils ne peuvent plus se permettre quoi que ce soit sur le marché. Et ils vivent désormais dans des tentes, peut-être dans un refuge, sans aucun moyen de réintégrer le marché de la location, a-t-il affirmé dans une entrevue. C'est une très grande montagne à gravir en ce moment. Tout soutien dans ce domaine bénéficierait grandement aux gens.»

L'un des clients de M. Groltz, Bradley Lowe, était au milieu d'une bataille judiciaire concernant les taux de soutien du revenu de la Nouvelle-Écosse lorsqu'il est décédé dans un campement, en décembre. M. Lowe recevait 380 $ par mois, le paiement standard pour une personne sans logement. Il avait fait valoir qu'il devrait avoir droit à 950 $, le tarif standard pour les personnes handicapées vivant dans un ménage.

La majorité des ménages canadiens bénéficiant de l'aide sociale en 2022 avaient des revenus annuels totaux qui les plaçaient dans une profonde pauvreté, selon Maytree, un groupe de réflexion anti-pauvreté basé en Ontario.

Le rapport de Maytree sur le bien-être social au Canada en 2022 indique que les revenus annuels des personnes seules considérées comme employables grâce aux mesures de soutien du revenu provinciales, y compris les allégements fiscaux et d'autres avantages, variaient entre 8031 $ au Nouveau-Brunswick et 20 905 $ au Québec. À Terre-Neuve-et-Labrador, une personne seule considérée comme employable gagnait 12 319 $.

La province a augmenté son taux de soutien du revenu de base de 5 % en 2022 et a introduit l'année dernière un programme de revenu de base qui débute en avril pour les résidents âgés de 60 à 64 ans. Elle a également annoncé une augmentation de ses avantages fiscaux et de ses suppléments de revenu pour les résidents à faible revenu, en particulier ceux qui ont des enfants.

Un porte-parole du ministère de l'Enfance, des Aînés et du Développement social de la province a déclaré qu'il existe des mesures de soutien pour les personnes recevant une aide gouvernementale qui recherchent un emploi, y compris une allocation de démarrage d'emploi de 250 $ pour les aider à couvrir les coûts qui y sont associés.

Une «mesure rentable», selon une experte

Jiaying Zhao, professeure agrégée de psychologie à l'Université de la Colombie-Britannique, a déclaré qu'il est «évident» que les provinces devraient offrir plus d'argent à leurs populations les plus pauvres et les plus vulnérables. Cela réduirait probablement l'itinérance et permettrait d’économiser l’argent des contribuables, a-t-elle expliqué en entrevue.

Mme Zhao a participé à un projet qui a donné à 50 sans-abri de la région du Lower Mainland, en Colombie-Britannique, un transfert unique en espèces de 7500 $ – soit à peu près le montant qu'ils recevraient en un an grâce à l'aide sociale dans la province – et les a ensuite suivis pendant 12 mois. L'étude, publiée l'année dernière dans les Actes de l'Académie nationale des sciences, a révélé que les bénéficiaires ont passé 99 jours de moins en situation d'itinérance et 55 jours de plus dans un logement stable. Ils ont également pu économiser davantage d’argent.

Les économies réalisées sur les frais de logement ont entraîné des «économies de coûts sociétaux» de 8277 $ par bénéficiaire, selon l'étude.

Mme Zhao a indiqué qu'il était «extrêmement» frustrant de voir le gouvernement dépenser des millions pour des hôtels ou de nouveaux refuges pour les sans-abri sans augmenter leurs revenus. Notant que son étude a utilisé un processus de sélection minutieux – l'équipe a choisi des personnes qui étaient en situation d'itinérance depuis moins de deux ans et qui n'avaient pas de problèmes importants de santé mentale ou de toxicomanie – Mme Zhao a soutenu que les gouvernements provinciaux devraient envisager non seulement d'augmenter les taux d'aide au revenu, mais aussi d'offrir un transfert d'argent en utilisant un processus de sélection similaire.

«C'est une mesure rentable», a-t-elle affirmé.

Sarah Smellie, La Presse Canadienne

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